Marangea

Extrait du Dictionnaire géographique, historique et statistique des communes de la Franche-Comté
de A. ROUSSET
Tome IV (1854)

Village de l'arrondissement de Lons-le-Saunier, canton, perception et bureau de poste d'Orgelet ; paroisse de Sarrogna ; à 3 km de Sarrogna, 5 d'Orgelet et 24 de Lons-le-Saunier. Altitude : 478m.
Le territoire est limité au nord et à l’est par Écrilles ; au sud par Nermier, et à l'ouest par Montjouvent et Nermier.
Il est traversé par la route départementale n° 9, d'Orgelet à Nantua et à Bourg ; par les chemins vicinaux tirant à Orgelet et à Montjouvent ; par le bief de la Tuffière, qui y prend sa source, et par le bief sous la Ville, qui prend sa source à Nermier, sous le nom de bief ou ruisseau de la fontaine de Nermier. Le bief d'Enfer sépare sur une grande longueur Marangea d'Écrilles.
Le village est situé au fond d'une vallée. Les maisons sont groupées, construites en pierre et couvertes en tuiles plates, creuses ou en chaume. Elles ne se composent que d'un rez-de- chaussée.

Population : en 1790, 93 habitants ; en 1846, 112 ; en 1851, 99, dont 44 hommes et 47 femmes ; population spécifique par km carré, 37 habitants ; 23 maisons ; 23 ménages.

État civil : Les plus anciens registres datent de 1793.

Vocable : Assomption de Notre-Dame. Paroisse de Sarrogna.
Série communale à la mairie. La série du greffe, déposée aux Archives Départementales a reçu les cotes 3 E 5044 à 5047, 3 E 8115, 3 E 9855 à 9857 et 3 E 13023. Tables décennales : 3 E 1283 à 1291.
Microfilmé sous les cotes 5 Mi 646 et 647, 5 Mi 1254, 2 Mi 1088, 2 Mi 1805 et 1806.

Les jeunes gens émigrent, pour être ouvriers ou domestiques à Lyon et à Paris.

Cadastre : exécuté en 1827 ; surface territoriale 263h 22a, divisés en 705 parcelles que possèdent 90 propriétaires, dont 50 forains ; surface imposable 259h savoir : 841a en terres labourables, 74 en bois-taillis, 42 en prés, 3 en friches et murgers, 55a en pâtures et 24a en broussailles, d'un revenu cadastral de 4367 fr.; contributions directes en principal 457 fr.
Le sol, très accidenté, ne rend que trois fois et demie la semence, et produit du blé, de l'orge, de l'avoine, du maïs, des légumes secs, des betteraves, des pommes de terre, du chanvre, du lin, des fruits, du foin et des fourrages artificiels. On importe le tiers des céréales et le vin. Le revenu réel des propriétés est de 3 fr. 73 c. pour cent.

NOTICE HISTORIQUE

La vallée au fond de laquelle se cachent Écrilles et Marangea est trop près de la ville d'Orgelet pour n'avoir pas été habitée de bonne heure. On a trouvé à Écrilles, un petit bélier en bronze, d'un travail grossier, et à Marangea, des ouvriers, en remuant un terrain, appelé sur le Montet, ont découvert en 1842, plusieurs tombeaux en maçonnerie recouverts de dalles, qui renfermaient des ossements humains.

Seigneurie : Marangea était un fief dépendant de la seigneurie d'Écrilles. Les sujets étaient mainmortables et soumis à de nombreux droits seigneuriaux. Ils devaient l'impôt des quatre cas, une poule par ménage, quatre corvées par an, une gerbe de froment pour droit de sergenterie, autant pour droit de messerie, des cens en argent et en grains affectés sur leurs meix et maisons, et la dixième gerbe de tous les blés récoltés sur les terrains communaux qu'ils cultivaient. Ils ne pouvaient extraire du tuf dans la tuffière pour le vendre, sans payer deux liards par voiture. Il leur était défendu de couper du bois pour leur usage ailleurs que dans la forêt qui était sous la tuffière. Ils devaient réparer le moulin et le battoir, y moudre leurs grains et battre leur chanvre.
Ils intentèrent deux procès au parlement en 1687 et en 1758, pour faire reconnaître que leur territoire avait été affranchi de la main-morte, mais leurs prétentions furent toujours repoussées.

Seigneurs : Le 20 septembre 1488, Marguerite de la Baume, dite d'Aubonne, dame de Marangea, et Jean de Bouze, son mari, vendirent à noble Philibert de Roche, écuyer, seigneur de Montjouvent, et à Huguette de Monjouvent, son épouse, le village de Marangea, avec les hommes, les femmes, les rentes, les cens, les revenus, le moulin, le battoir, les cours d'eau, la justice, les bois, les terres et autres dépendances de ce domaine, moyennant 800 fr. Lorsque les acquéreurs présentèrent leur titre à l'approbation de Simone d'Oiselay, darne d'Écrilles, leur suzeraine, cette dernière répondit qu'elle entendait user du droit de retrait féodal et offrit aussitôt de leur rembourser le prix qu'ils avaient payé. Philibert de Roche refusa. Une procédure s'engagea à cette occasion au bailliage de Montmorot. Par une sentence du 10 septembre 1491, Jean Barillet, écuyer, seigneur de Légna, lieutenant du bailli d'Aval au siège d'Orgelet, accorda gain de cause à Simone d'Oiselay. Dès ce moment, Marangea n'a plus été séparé d'Écrilles.

Fiefs : En 1258, Jean, sire de Cuiseaux, reçut l'hommage de ce que Pierre de Roussillon, chevalier, tenait de lui en fief à Écrilles, Marangea et Virechâtel. Au mois de septembre 1296, Guy de Chilly, chevalier, et Guye, épouse de Jean de La Marche, firent hommage à Jean de Chalon, comte d'Auxerre et seigneur d'Orgelet, de tout ce qu'ils possédaient à Marangea et à Merlia.

Evénements divers : Marangea ressentit le contre-coup de tous les sièges dont Orgelet fut victime. Ce village fut entièrement détruit par les troupes de Louis XI, en 1479. L'emplacement des habitations ruinées s'appelle aux Murgers et aux Chaseaux.

Paroisse : Marangea dépendait, avant la révolution , de la paroisse d'Orgelet. Ce village a pour patron saint Pancras.

Curiosités naturelles : Dans le flanc de la montagne dite sur le Mont, est une grotte connue sous le nom de la Balme ou de la Bazune. Sa largeur à l'orifice est de 20 pieds et dans l'intérieur de 54. Sa profondeur est de plus de 300 pieds. L'obscurité qui y règne, ne permet de la visiter qu'à l'aide de flambeaux. « Il y a dans sa vaste capacité, dit le P. Joly, des antres ténébreux, capables d'intimider les plus hardis ; mais ce qui réjouit, c'est une fontaine dont l'eau est excellente. On sait par tradition, que pendant les guerres de 1636 à 1674 , cette caverne servait de retraite à plusieurs familles d'Orgelet, lesquelles avaient de là, la triste perspective de l'incendie de leur ville. »
Le rocher appelé la Tuffière, est tellement percé de grottes, qu'il ressemble à une éponge colossale. Contre ce rocher, se précipite avec fracas le bief de la Tuffière, qui prend sa source au sommet de la montagne.